Le CSE, l’environnement et l’emploi

L’environnement arrive aujourd’hui peu à peu au coeur de nombreux débats sociaux et politiques. Les liens entre problèmes environnementaux et santé publique deviennent aussi de plus en plus fréquents : réchauffement climatique, pollutions résiduelles d’anciennes exploitations minières par exemple, pollution récente au plomb -par exemple suite à l’incendie de Notre Dame de Paris-, et même la pandémie de COVID-19.

Le monde du travail n’échappe pas à ces enjeux. La tentation peut être grande pour certains types d’industrie d’opposer la production et l’emploi à l’environnement et la santé publique. Aussi, Midi-CTES considère qu’il est important que le CSE s’empare de cette attribution, au même titre que la santé-sécurité au travail, et la politique économique de l’entreprise.

Nous avons mis en ligne un questionnaire pour mieux connaître comment les Institutions Représentatives du Personnel (anciens CHSCT, Comité d’entreprise, délégués du personnel et aujourd’hui les CSE) s’emparent ou non des questions environnementales et de santé publique. Nous vous invitons à y répondre.

Questionnaire CSE : Emploi-Environnement-Santé Publique


Environnement et santé publique, ce que dit la loi

Les CSE a hérité des attributions du CHSCT en matière d’environnement. L’article L. 2315-27 précise que :

Le comité est en outre réuni à la suite de tout accident ayant entraîné ou ayant pu entraîner des conséquences graves, ainsi qu’en cas d’événement grave lié à l’activité de l’entreprise, ayant porté atteinte ou ayant pu porter atteinte à la santé publique ou à l’environnement et à la demande motivée de deux de ses membres représentants du personnel, sur les sujets relevant de la santé, de la sécurité ou des conditions de travail.

Avant l’accident, le CSE (ou tout autre travailleur) peut exercer son droit d’alerte. Comme en matière de santé-sécurité au travail, le même principe de prévention s’applique : il faut maîtriser le risque à la source.

De plus, l’employeur a obligation d’information des travailleurs sur le risque que les produits ou les procédés peuvent faire encourir à la santé publique ou à l’environnement (article L. 4141-1 du code du travail). 

L’employeur organise et dispense une information des travailleurs sur les risques pour la santé et la sécurité et les mesures prises pour y remédier.

Il organise et dispense également une information des travailleurs sur les risques que peuvent faire peser sur la santé publique ou l’environnement les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en œuvre par l’établissement ainsi que sur les mesures prises pour y remédier.

Dans les établissements comportant au moins une installation susceptible de donner lieu à des servitudes d’utilité publique, le comité social et économique peut également faire appel à un expert en risques technologiques à l’occasion de la demande d’autorisation environnementale (art. L. 4523-5 du code du travail). Les servitudes d’utilité publique peuvent être relatives entre autres à l’utilisation de certaines ressources (barrages hydroéléctriques, ligne à haute tension, mines, etc.), relatives à la conservation du patrimoine (historique, sportif).

La loi du 22 août 2021 portant sur la lutte contre le déréglement climatique et le renforcement de la résilience face à ses effets tente de renforcer le rôle des CSE dans les entreprises de plus de 50 salariés. 

Ainsi, le CSE doit être informé et consulté sur les conséquences environnementales des mesures affectant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise. (article L.2312-8-1 du code du travail). Dans les entreprises de 50 salariés et plus, le CSE est compétent pour demander à l’employeur de « rendre des comptes » sur les conséquences environnementales de ses projets de décisions, dans le cadre de la plupart des consultations. C’est à dire qu’en cas de projet important modifiant les conditions de travail, l’employeur doit aussi évaluer les conséquences environnementales de ce projet. 

Une nouvelle rubrique est ainsi créée dans la BDES qui devient BDESE (pour environnementales), comme stipulé dans l’article L. 2312-18 du code du travail.


Le droit d’alerte en matière d’environnement ou santé publique

Les salariés, comme le CSE, ont le droit d’alerte en matière d’environnement ou de santé publique. Ce droit d’alerte est précisé dans l’article L4133-1 du code du travail.

Le travailleur alerte immédiatement l’employeur s’il estime, de bonne foi, que les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en œuvre par l’établissement font peser un risque grave sur la santé publique ou l’environnement.
L’alerte est consignée par écrit dans des conditions déterminées par voie réglementaire.
L’employeur informe le travailleur qui lui a transmis l’alerte de la suite qu’il réserve à celle-ci.

Même si l’article ne précise que « le travailleur », il est préférable que ce soit le CSE qui s’empare de cette question, et précise dans sa démarche, quels sont les produits ou procédés qui peuvent nuire à l’environnement ou à la santé publique, et quelles peuvent être les conséquences de l’exposition. 

Le droit d’alerte est donc une procédure écrite, consignée dans un registre prévu à cet effet et qui est sous la responsabilité de l’employeur. Les pages du registre doivent être numérotées, et l’alerte doit être datée et signée par le représentant du CSE.

Après l’alerte, l’employeur doit examiner la situation avec le CSE. La situation doit être examinée conjointement avec le représentant du personnel au CSE et l’employeur.  L’employeur doit ensuite informer le comité des suites données, et des mesures prises.

En cas de désaccord entre le CSE et l’employeur, ou si l’employeur n’a rien fait, dans un délai d’un mois, le CSE peut saisir le représentant de l’Etat du département de l’entreprise – le préfet- (article L4133-3 du code du travail).

En cas de divergence avec l’employeur sur le bien-fondé d’une alerte transmise en application des articles L. 4133-1 et L. 4133-2 ou en l’absence de suite dans un délai d’un mois, le travailleur ou le représentant du personnel au comité social et économique peut saisir le représentant de l’Etat dans le département.

Attention, le droit d’alerte en matière d’environnement ou de santé publique engage l’employeur : En cas d’accident et de dommage, normalement, c’est le fabricant du produit en cause qui est responsable. Si l’employeur ignore l’alerte, alors il lui sera plus difficile d’invoquer cette clause puisqu’il a été prévenu du risque par le CSE.

Enfin, en cas d’accident ayant porté atteinte ou ayant pu porter atteinte à l’environnement ou à la santé publique, le CSE doit être réunit dans une réunion « extraordinaire ».

Attention, le droit d’alerte environnemental n’est pas pas un droit de retrait -a priori-. 


Point du vue économique et impact sur l’emploi

La transition énergétique, le réchauffement climatique, et les nouvelles considérations environnementales vont impacter l’économie et l’emploi.

Selon l’OIT, le stress thermique dû au réchauffement climatique conduira à une baisse de la productivité mondiale équivalente à 80 millions d’emplois. Cette baisse de la productivité impactera principalement les pays pauvres, et les secteurs de l’agriculture et du bâtiment-travaux publics.

La production des moteurs thermiques, en particulier des moteurs diesel, connaît une baisse drastique qui va s’accentuer.

Des projets industriels controversés sont parfois abandonnés, comme l’ouverture de certaines mines. Les centrales thermiques risquent la fermeture. Le débat sur le nucléaire (la filière nucléaire représente 400 000 emplois en France) n’est pas tranché : doit-on considérer les centrales nucléaires comme un mode de production non polluant d’énergie ? Quel est l’avenir du secteur de l’aéronautique et de ses sous-traitants ? Le Plan Déplacement Entreprise ou Plan de Mobilité est en place dans certaines entreprises; est-il possible de l’améliorer ? Quels sont les impacts du développement de la filière hydrogène sur l’économie, le salariat, les infrastructures ?

Dans tous ces cas, l’avenir de l’emploi est un souci pour les travailleurs et leurs élus, et pour les territoires. Le débat est vite clivant, entre les salariés qui défendent leur emploi, la rationalité économique des employeurs et des élus locaux, et ceux qui mettent en avant l’environnement. Dans ce contexte, le CSE a son mot à dire. Oui, il est possible de préserver les emplois existants et d’en créér tout en se souciant de l’environnement, et des conditions de travail des salariés. Les salariés n’ont pas à être victimes de la transition énergétique, et les conditions de travail n’ont pas à se déteriorer sous ce prétexte. C’est le parti pris de Midi-CTES.

Le CSE peut s’emparer de la question environnementale et de la santé publique dans les domaines sur lesquels il est obligatoirement consulté :

  • Les orientations stratégiques de l’entreprise ;
  • La situation économique et financière de l’entreprise ;
  • La politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi.
  • Chaque projet de réorganisation soumis à consultation du CSE doit mesurer les conséquences environnementales (nouvelle loi climat et résilience)

Les salariés et leurs élus au CSE ne doivent pas être pris de court sur leur situation, ni sur la situation économique de l’entreprise.